Les contrôles d'identité

Le contrôle d’identité consiste à interpeller une personne pour qu’elle justifie de son identité « par tous moyens ». Ils sont effectués par des Officier de Police Judiciaire (OPJ) ou des Agents de Police Judiciaire (APJ) placés sous la responsabilité des OPJ.

Les contrôles d’identités sont soumis au contrôle du ministère public qui selon l’article 12 du code de procédure pénale, dirige les services de police et l’article 41 du code de procédure pénale, qui leur permet de « procéder à tous les actes nécessaires à la recherche et à la poursuite des infractions … »

Toutes les actions des services de police sont dirigées par le procureur de la République, et placées sous la surveillance du procureur Général et le contrôle de la chambre de l’instruction.

Il existe en réalité plusieurs contrôles d’identités différents selon l’infraction recherchée et les buts poursuivis.

Le contrôle d’identité à l’initiative de l’OPJ (article 78-2-1 du code de procédure pénale)

L’OPJ ou l’APJ (agissant sous le contrôle et la responsabilité de l’OPJ) peuvent contrôler l’identité de toute personne:

  • Contre laquelle il existe des soupçons qu’elle a commis ou tenté de commettre une infraction
  • Qui s’apprête à commettre un délit
  • Qui peut fournir des renseignements sur une enquête (en cas de flagrant délit)
  • Qui fait l’objet de recherches

L’OPJ agit de sa propre initiative, mais il faut qu’un indice objectif dans le comportement de la personne laissant soupçonner la commission ou tentative de commission d’infraction.

Les hypothèses retenues par la jurisprudence pour justifier ces contrôles d’identité sont:

Une attitude suspecte, jeter un sac ou un blouson, prendre la fuite dans un immeuble (Cass. crim., du 14 avril 2015, n° 14-83.462), changer de direction à la vue des policiers (Cass. crim., du 03 janvier 1991, n°90-83.625), s’intéresser de trop près et de nuit à des véhicules stationnés ( Cass. crim., du 13 janvier 1986, n°84-90.041).

Le contrôle requis par le procureur de la République (article 78-2-2 du code de procédure pénale)

Il s’agit de contrôles d’identités systématiques de toute personne se trouvant dans le périmètre désigné par le procureur de la République.

L’article 78-2-2 du code de procédure pénale réformé par la loi n° 2016-731 du 03 juin 2016, étend désormais, ces contrôles aux visites des véhicules et aux fouilles des bagages.

Le procureur de la République doit faire des réquisitions écrites fixant les infractions poursuivies, le périmètre et le délai durant lequel auront lieu ces contrôles (une circulaire de 1993 préconise de les limiter à une demi-journée).

Ces zones sont celles où une infraction vient d’avoir lieu (vol, cambriolage, recherches d’auteurs d’infractions…), ou connues pour être des lieux où se commettent régulièrement des infractions (infractions routières, vol à la tire dans les stations de métro, trafic de stupéfiants dans des lieux publics…).

Il y aura un déploiement de forces de l’ordre sur une zone précise et durant un temps déterminé pour procéder à des vérifications d’identité.

Seul l’OPJ est habilité à faire des contrôles l’identité sur réquisitions du parquet. L’APJ ne peut que l’assister ! (Cass. civ., 1ère du 16 mars 2016, n°14-25.068).

Le contrôle sera valide cas de découverte d’infraction, même si elles ne sont pas spécifiées dans les réquisitions (flagrant délit).

Peu importe le comportement ou les suspicions pesant sur une personne.

Mais en cas de contestation, il appartient aux OPJ en charge du contrôle d’apporter la preuve de l’objectivité et du déroulement des opérations de contrôle (Cass. civ., 1ère du 9 novembre 2016, n°15-25.873). Dans le cas contraire le contrôle sera jugé discriminatoire et la responsabilité de l’Etat sera engagée pour faute lourde.

Ce qu’il faut préciser : La cour de cassation a retenu dans un arrêt du 9 novembre 2016 l’existence d’un contrôle d’identité discriminatoire.

Reconnaître l’illégalité d’un contrôle au faciès ne signifie pas que l’on ne peut plus contrôler des personnes appartenant à des minorités visibles, mais qu’il faudra l’existence de motifs réels et sérieux pour les contrôler.

Ainsi, ce même 9 novembre 2016, la cour de cassation a rendu 9 arrêts qui ont rejeté l’existence de discrimination, notamment au motif que «  la différence de traitement était justifiée par des éléments objectifs, en ce que la personne contrôlée répondait au signalement de l’un des suspects »

Les contrôles faisaient suite au lancement d’un avis de recherche d’un suspect de type maghrébin. Cet avis de recherche ayant justifié les contrôles d’un groupe de maghrébin, ils ne pouvaient pas être jugés discriminatoires (Cass. crim., du 9 novembre 2016, n°15-25.210 ; 15-24.212).

Le contrôle d’identité administratif, ou préventif ( article 78-2-3 du code de procédure pénale)

Ces contrôles ont pour but de prévenir toute atteinte à l’ordre public, aux personnes ou aux biens.

Peu importe le comportement de la personne contrôlée, il n’est pas nécessaire qu’une attitude éveille des soupçons, c’est la différence avec les contrôles de l’OPJ visés à l’article 78-2-1, vu supra.

Il peut s’agir de la fouille de véhicules circulant ou arrêtés sur la voie publique ou dans des lieux accessibles au public, lorsqu’il existe à l’égard du conducteur ou d’un passager une ou plusieurs raisons plausibles de soupçonner qu’il a commis, comme auteur ou comme complice, un crime ou un délit flagrant ou une tentative de ces infractions.

Seuls les OPJ sont habilités à faire ces contrôles, les APJ ne peuvent que les assister (Cass., crim., du 28 sept. 2010, n°10-82.699).

Mais ces contrôles ne doivent être ni systématiques, ni arbitraires. Les OPJ doivent justifier les circonstances particulières ayant justifiées ce contrôle et en quoi consistait l’atteinte à l’ordre public. (Cass. Civ.,1ère du 3 février 2010, n° 08-21.419).

La fouille du sac : Les articles 76 du code de procédure pénale et R.434-16 du code de la sécurité intérieure, ne permettent pas aux forces de l’ordre de procéder à la fouille du sac sans l’assentiment de la personne si… la palpation n’a rien donnée et qu’il n’y a aucun indice laissant présumer l’existence d’une infraction (Cass. crim., du 23 mars 2016, n°14-77.370).

Le relevé d’identité (article 78-6 du code de procédure pénale)

Ce n’est pas un contrôle d’identité ! Il s’agit de relever l’identité figurant sur les papiers des personnes que des APJ adjoints ou des policiers municipaux verbalisent au cours de la constatation et/ou de la verbalisation d’une contravention (code de la route, stationnement…).

La loi du 15 novembre 2001 sur « la sécurité quotidienne », a étendue cette possibilité aux volontaires de la gendarmerie, aux adjoints de sécurité et aux agents de surveillance de Paris, (dits les APJ 21 du nom de l’article encadrant leurs actions).

Ce contrôle est limité à la seule production d’une pièce d’identité. Ni les APJ, ni les policiers municipaux ne peuvent retenir une personne pour des vérifications approfondies, ni vérifier si les documents produits sont conformes à la réalité.

Si le contrevenant n’a aucun papier sur lui attestant de son identité, ou qu’il refuse de les produire, l’article 78-6 alinéa 2 du code de procédure pénale, prévoit l’intervention d’un OPJ.

Le contrevenant peut être retenu le temps strictement nécessaire à l’APJ pour joindre un OPJ afin de lui demander ce qu’il doit faire (lui amener la personne au poste pour vérification ou la laisser partir).

S’il ne parvient pas à la joindre, il doit laisser repartir la personne sans délai. De même que s’il parvient à le joindre et que l’OPJ ne donne pas suite, l’APJ devra laisser repartir le contrevenant sans délai.

Dans le cas contraire, il faudra appliquer la procédure de la vérification d’identité.

La vérification d’identité (article 78-3 du code de procédure pénale)

Si la personne interpellée ne peut justifier de son identité et ce quel que soit le contrôle initié.

L’OPJ pourra demander à l’APJ de lui présenter le contrevenant pour une vérification d’identité au poste qui devra être limitée à 4 heures : C’est une rétention.

Le délai de rétention court rétroactivement à compter du relevé d’identité.

Durant le délai nécessaire au transfert du contrevenant à l’OPJ, l’APJ peut, de manière tout à fait exceptionnelle, procéder à la palpation et à l’usage des menottes. Ces mesures doivent être proportionnées et utilisées que si le comportement de la personne le nécessite (article 803 du code de procédure pénale).

A l’issue de ce délai, si la mesure se prolonge (suspicion de faux papiers, usurpation d’identité…), l’OPJ devra prendre une mesure de garde à vue dont le délai déjà écoulé sera déduit.

Que cette vérification ait lieu sur place ou au poste, elle ne doit pas excéder 4 heures. C’est le temps nécessaire pour effectuer toutes les investigations permettant d’identifier la personne.

Il faut l’autorisation du procureur de la République pour faire des relevés d’empreintes, faire des photographies, auditionner de témoins… Si cette autorisation est accordée et que la personne refuse de s’y soumettre, c’est un délit passible de 3 ans de prison et de 3750 euros d’amende.

À l’issue de la vérification un procès verbal doit être remis au procureur de la République et une copie à la personne contrôlée. Il comprend les motivations à l’origine du contrôle, les opérations effectuées (prises d’empreintes…).

Le contrôle d’identité des étrangers (article L.611-1 du code de l’entrée et du séjour des étrangers et du droit d’asile)

Toute personne étrangère doit présenter les documents l’autorisant à circuler et séjourner en France.

Ce contrôle peut être effectué par un OPJ, ou, sous son contrôle, un APJ ou, un policier municipal.

Les contrôles doivent être fait de manière objective et sans discrimination (réserves du conseil constitutionnel du 13 août 1993).

Dans les arrêts Bogdan et Vuckovic, la cour de cassation a précisé que les éléments motivant le contrôle doivent être extérieurs à la personne (Cass. crim., du 25 avril 1985, n°84-92.916).

La couleur de la peau, ou le fait de parler en langue étrangère ne peut donc pas motiver un contrôle d’identité des étrangers (Cass. crim., 10 novembre 1992, n°92-83.352, Bassilika)

Mais, le fait d’être dans un véhicule immatriculé dans un pays étranger sera un élément objectif extérieur à la personne qui pourra motiver un contrôle (Cass. Crim., 25 avril 1985, n°85-91.324).

Le contrôle routier (articles R.130-1 et R.233-1 du code de la route)

Toute personne circulant à bord d’un véhicule sur la voie publique doit justifier de son identité, des papiers du véhicule et… se plier à l’ouverture du capot pour vérifier le n° de série.

Le contrôle a pour but de rechercher et de constater l’infraction. Refuser de se soumettre au contrôle est un délit sanctionné de 3 ans et de 3 750 euros d’amende.

À noter : La fouille de l’habitacle ou du coffre est assimilé une perquisition ! Elle ne peut pas s’effectuer dans le cadre d’un simple contrôle routier (Cass. crim., du 23 juin 1964, n°62-93.147).

Seul un OPJ est habilité à fouiller un véhicule ( Cass. crim., du 28 septembre 2010, n°10-82.699).

Le contrôle d’identité aux frontières (article 78-2 alinéa 8 du code de procédure pénale)

Il s’agit de contrôles permettant la prévention et la recherche d’infraction liées à la criminalité transfrontalière pour une durée limitée à 6 heures.

Ce contrôle s’exerce sur toutes personnes situées dans un périmètre de 20 km de la zone frontalière d’un état partie à la convention de Schengen ; ainsi que dans tous les ports, aéroports, gares ferroviaires ou routières, accessibles au public et ouverts au trafic international.

Dans deux arrêts Melki et Abdeli du 22 juin 2010, la Cour européenne a limité ces contrôles à:

  • La prévention et la recherche des infractions liées à la criminalité transfrontalière
  • Une durée maximale de 6 heures consécutives sur un même lieu

Dans tous les cas, il y a interdiction d’effectuer des contrôles systématiques des personnes circulant dans les zones transfrontalières.

Le contrôle d’identité pour lutter contre le travail illégal ( article 78-2-1 du code de procédure pénale)

Ce contrôle exercé à titre préventif sur réquisition du procureur de la République, a pour but de vérifier que les personnes travaillant dans une entreprise, un chantier… ont été déclarées par leur employeur (déclarations préalables à l’embauche, registre du personnel…). Des agents de l’URSSAFF, du trésor public… pourront participer au contrôle.

Ces contrôles visent les infractions spécifiques des articles du code de travail. Elles ne peuvent avoir lieu dans local servant de logement : C’est une perquisition.

Ce contrôle spécifique ne peut être fait que sur réquisitions écrites du procureur de la République.

Il ne peut s’effectuer que sur une zone strictement délimitée et sur une période maximale d’un mois.

Ces réquisitions doivent être régulièrement présentées aux personnes chez qui ont lieu ce contrôle.

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